Bogotá, 6 novembre 2024
Aux ministres, législateurs, fonctionnaires et au public concerné :
En Amérique latine et dans les Caraïbes, les mariages et unions d'enfants, précoces et forcés restent l'une des formes les plus graves de violence à l'encontre des enfants, avec des conséquences dévastatrices sur la vie des filles et des adolescentes. Ce problème affecte leur santé, limite leurs possibilités et viole leurs droits, entravant ainsi les efforts en faveur de l'égalité des sexes et du développement de nos sociétés. À l'occasion de la première conférence ministérielle pour mettre fin à la violence contre les enfants, nous appelons les États et les dirigeants à s'engager à mettre fin à la violence contre les enfants et à prendre des mesures décisives pour protéger les enfants et faire progresser les engagements mondiaux, en particulier les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) 5 et 16.
Girls Not Brides, Equality Now, GENFAMI, Profamilia et le Fonds mondial pour l'enfance réaffirment leur engagement en faveur des droits de l'enfant et de l'égalité des sexes, reconnaissant que la CEFMU constitue une violation fondamentale de ces droits. Notre approche est guidée par les principes de justice, de dignité et de développement holistique, promouvant le bien-être et l'autonomie des enfants et des adolescents en Amérique latine et dans les Caraïbes.
La situation actuelle est alarmante :
- Dans la région, une fille ou adolescente sur cinq se marie ou s'engage dans une union avant l'âge de 18 ans, et 4 % le font avant l'âge de 15 ans ;
- Dans les zones rurales et les contextes de pauvreté, les taux sont nettement plus élevés, allant de 40% à 65% ;
- Le taux de fécondité des adolescentes en Amérique latine et dans les Caraïbes est l'un des plus élevés au monde (62 pour 1 000), ce qui est étroitement lié aux unions précoces ; et
- En Colombie, les taux de CEFMU se maintiennent autour de 23 %, avec des variations alarmantes dans les zones rurales et les communautés indigènes.
Dans ce contexte, nous exhortons les gouvernements régionaux, et en particulier le gouvernement colombien, à donner la priorité et à adopter des lois qui protègent les droits des enfants en établissant une interdiction absolue du CEFMU. En Colombie, le projet de loi n° 297-2024 représente un pas en avant crucial dans cette direction. Cette loi interdit non seulement le mariage et les unions de fait avec des mineurs, mais prévoit également des mesures de prévention et de protection visant à garantir le développement complet et sûr des filles et des adolescentes. L'adoption de cette loi en Colombie constituerait un précédent précieux pour l'ensemble de la région et témoignerait de la volonté d'éradiquer la CEFMU.
Pour mettre fin aux mariages d'enfants et aux unions forcées précoces dans la région ALC et en Colombie, il est essentiel de.. :
- Renforcer le cadre juridique et les institutions dans tous les pays, en fixant à 18 ans l'âge minimum du mariage sans exception et en encourageant une application rigoureuse par la formation des principaux fonctionnaires et le renforcement des systèmes d'enregistrement ;
- Investir dans des systèmes qui protègent et garantissent les droits, tels que la santé (en particulier la santé sexuelle et reproductive), l'éducation et la justice, afin de garantir une protection complète et l'autonomie des enfants et des adolescents ;
- S'attaquer aux causes structurelles, en reconnaissant que l'inégalité socio-économique et l'inégalité entre les sexes sont des moteurs de l'UEMF. Les politiques doivent aller au-delà des mesures punitives pour s'attaquer aux contextes de violence et d'exclusion et pour améliorer les perspectives de vie des filles, des adolescentes et des femmes ;
- mettre en œuvre des campagnes de sensibilisation sur les droits de l'enfant et les effets négatifs de l'UEMF, et veiller à ce que la société civile utilise ces lois pour renforcer l'accès à la justice et la responsabilisation ; et
- Responsabiliser les filles et les adolescentes, notamment en les faisant participer activement aux décisions politiques qui affectent leur vie, ainsi qu'aux programmes qui renforcent leur autonomie et leur développement.
Ces actions sont fondamentales pour garantir un changement profond et durable dans l'éradication de la CEFMU. Suite aux engagements pris par les représentants du Sénat et le Président du Sénat de donner la priorité à cette loi lors de la prochaine séance plénière du 25 novembre 2024, nous appelons les représentants législatifs à adopter le projet de loi et à accroître l'engagement pour sa mise en œuvre complète et le financement du programme de prévention et de soins proposé.
Nous appelons les États et les dirigeants présents à cette conférence à s'engager dans une action concrète et multisectorielle pour éradiquer la CEFMU. Il est essentiel d'adopter des mesures urgentes et durables qui non seulement protègent les filles et les adolescentes de ces risques, mais qui s'attaquent également aux causes structurelles qui perpétuent ce problème. Nous exhortons les gouvernements à mettre en œuvre des programmes de prévention, d'éducation et de soins qui garantissent le bien-être et le plein développement des enfants et des adolescents.
Chaque fille et chaque adolescente mérite de grandir à l'abri de la violence et d'avoir la possibilité de réaliser son potentiel. L'éradication des mariages d'enfants et des unions forcées précoces est un objectif réalisable si nous travaillons collectivement et agissons aujourd'hui. Nous sommes à un moment crucial pour faire la différence dans la vie des enfants et des adolescents. Au nom de Girls Not Brides, Equality Now, GENFAMI et Profamilia, nous invitons tous les participants à la conférence à se joindre à nous pour construire un avenir sans violence et plein d'opportunités pour tous les enfants et adolescents.
Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de mes sentiments distingués,
Girls Not Brides : Le partenariat mondial pour mettre fin au mariage des enfants
L'égalité maintenant
GENFAMI
Profamilia
Fonds mondial pour l'enfance