Kenya

12,5 % des filles kenyanes se marient ou contractent une union avant l'âge de 18 ans et 2,2 % se marient avant l'âge de 15 ans.

Au Kenya, 1,8 % des garçons se marient avant l'âge de 18 ans.

Les taux de mariage d'enfants au Kenya varient selon les régions et les groupes ethniques. Le mariage d'enfants est le plus fréquent dans le nord du Kenya (56 %), suivi de la province de la côte (41 %) et de Nyanza (32 %).

Selon une étude de l'UNICEF de 2017, 64% des filles d'origine Pokot se sont mariées avant d'atteindre l'âge de 18 ans, suivies par 54% des filles Rendille, 38% des filles Somali et 28% des filles Maasai. 38% des garçons Pokot et 14% des garçons somaliens se sont mariés avant d'atteindre l'âge de 18 ans.

Le mariage d'enfants est motivé par l'inégalité entre les sexes et la croyance que les filles sont en quelque sorte inférieures aux garçons.

Au Kenya, le mariage des enfants est exacerbé par :

● La pauvreté: La pauvreté, associée à la faible valeur sociale et économique accordée aux filles , représente un facteur clé du mariage des enfants au Kenya. Les filles vivant dans des ménages pauvres sont deux fois plus susceptibles de se marier avant l'âge de 18 ans que les filles vivant dans des ménages aux revenus plus élevés. Les filles sont souvent considérées comme des atouts ou comme un fardeau économique, mariées afin de libérer leurs parents du fardeau économique que représente leur prise en charge. Les pères des communautés les plus pauvres organisent le mariage de leurs filles en échange d'une somme d'argent composée de bétail, de chameaux et d'ânes.

● Le niveau d'éducation : Plan rapporte que les filles kényanes qui abandonnent l'école, quelle qu'en soit la raison, sont plus susceptibles de finir mariées. Certains parents retireraient les filles de l'école pour les marier dès qu'elles ont leurs règles.

● Pratiques néfastes : Au sein de la communauté Samburu, le perlage est une pratique néfaste par laquelle un proche de la famille s'approche des parents d'une jeune fille avec des perles rouges Samburu et place le collier autour du cou de la jeune fille. Cela signifie un engagement temporaire entre le parent et la jeune fille, et le parent peut alors avoir des relations sexuelles avec elle. Certaines filles sont "perlées" dès l'âge de 6 ans et on estime que trois filles sur quatre dans la tranche d'âge 8-12 ans sont perlées. Le perlage est reconnu comme une forme de viol d'enfant par la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDAW).

● Les mutilations génitales féminines et l'excision (MGF/E) : Alors que la prévalence nationale des MGF/E est de 15 %, dans certaines communautés, elles sont quasi universelles. Pour les Kuria, les Maasai, les Rendille et les Turkana, l'E/MGF est considérée comme un signe de préparation au mariage et a généralement lieu entre 9 et 17 ans. Les filles qui ont subi l'E/MGF ont un prix de la mariée plus élevé que celles qui ne l'ont pas subie. Pendant les vacances scolaires d'août et de décembre, les filles de la région de Pokot s'enfuient de chez elles car de nombreuses mutilations ont lieu pendant cette période.

● La grossesse chez les adolescentes : Le mariage des enfants est considéré comme une protection contre les comportements immoraux et l'ultime protection contre l'attention sexuelle masculine. Une étude de Plan réalisée en 2012 montre que les parents de Kilifi et de Kwale mariaient leurs filles enceintes pour protéger leur statut et leur nom de famille, et pour recevoir à la fois la dot et une " pénalité " de la part de l'homme responsable de la grossesse. Les enfants sont davantage respectés lorsque leur mère est mariée et deviennent ng'ide awi (enfants de la maison) plutôt que ng'ide akeor (enfants des champs). Dans les communautés kuria, les jeunes filles enceintes sont parfois mariées à des femmes plus âgées qui ne peuvent pas avoir de fils, selon une tradition connue sous le nom de Nyumba boke.

● Mauvaise application de la loi: Bien que la loi sur l'enfance interdise le mariage des enfants, les autorités ne considèrent pas qu'il leur incombe de l'empêcher. Les actes de naissance et de mariage sont rarement produits ou vérifiés au moment du mariage. Les cas de mariage d'enfants portés devant les tribunaux pour être poursuivis sont retardés ou n'aboutissent pas en raison de la corruption. Les chefs communautaires et religieux s'opposent également à l'application de la loi.

● La fuite: Certaines filles se marient pour échapper à des parents stricts et contrôlants, à l'orphelinat et à la négligence des personnes qui s'occupent d'elles. Les filles considèrent également le mariage comme un moyen d'échapper à la pauvreté et aux inégalités. Souvent, les familles pensent que la dot qu'elles reçoivent pour le mariage de leur fille soulagera leurs problèmes financiers.

● Les normes culturelles: Dans la société kényane, le mariage est socialement accepté et respecté. Une étude réalisée en 2022 dans le nord-est du Kenya a révélé qu'au sein des communautés pastorales, le mariage des enfants était souhaité comme un moyen de prévenir les relations sexuelles pré-maritales et de permettre aux filles de mettre au monde de nombreux enfants. Dans ces communautés, le rôle des femmes se limitait à la procréation et à l'éducation des enfants.

Les contextes humanitaires peuvent englober un large éventail de situations avant, pendant et après les catastrophes naturelles, les conflits et les épidémies. Ils exacerbent la pauvreté, l'insécurité et le manque d'accès à des services tels que l'éducation, autant de facteurs qui favorisent le mariage des enfants. Si l'inégalité entre les sexes est une cause fondamentale du mariage d'enfants dans les contextes stables comme dans les contextes de crise, c'est souvent en temps de crise que les familles voient dans le mariage d'enfants un moyen de faire face à des difficultés économiques accrues et de protéger les filles d'une violence accrue[RH1].

Le Kenya subit des conditions météorologiques erratiques, notamment des sécheresses et des inondations, qui entraînent des pertes en vies humaines, en terres cultivées, en bétail et en biens, et entravent l'accès à la nourriture. Entre décembre 2019 et mars 2020, le Kenya a connu l'une des pires infestations de criquets pèlerins. Les aléas climatiques continus ont exacerbé l'insécurité alimentaire, la malnutrition sévère et l'apparition de maladies.

Outre les risques climatiques, le Kenya abrite l'une des plus importantes populations de réfugiés en Afrique, accueillant des personnes originaires de Somalie, du Soudan du Sud, d'Éthiopie et de la République démocratique du Congo. La majorité des réfugiés sont hébergés dans les camps de Dadaab et de Kakuma, situés dans des régions du Kenya touchées par une grave sécheresse.

● Les catastrophes naturelles et le changement climatique : Les conditions de sécheresse et de famine se sont détériorées au Kenya en 2017. Par conséquent, en février 2023, il y a plus de 4,4 millions de personnes en situation d'insécurité alimentaire nécessitant une aide humanitaire, dont 970 214 enfants sont considérés comme souffrant de malnutrition. Les enfants courent un risque accru d'être séparés de leur famille, d'abandonner l'école et d'être mariés pour obtenir une dot, ce qui est une tactique de survie. Les pratiques de dot sont exacerbées en période de crise, comme la sécheresse, et contribuent à l'augmentation du nombre de mariages d'enfants. En mars 2023, les pluies saisonnières ont affecté 52 000 personnes et déplacé 25 190 personnes. Selon les défenseurs des droits des filles masaï, les sécheresses prolongées incitent de nombreuses familles à donner des jeunes filles en mariage en échange de bétail. La longue marche à la recherche d'eau expose également les jeunes filles à des abus sexuels et à des grossesses non désirées, qui peuvent à leur tour déboucher sur un mariage précoce.

● Déplacement: En janvier 2023, le Kenya accueillait près de 577, 492 réfugiés et demandeurs d'asile, principalement originaires de Somalie(50%), du Soudan du Sud(27%), et de la République démocratique du Congo(9%), de l'Éthiopie(6%) et du Burundi(4%) - des pays où la prévalence du mariage d'enfants est élevée. Bien que nous ne disposions pas de preuves concrètes de l'existence de mariages d'enfants dans les camps de réfugiés kenyans, la littérature disponible indique que les déplacements augmentent la vulnérabilité des filles au mariage d'enfants en raison de la rupture des réseaux sociaux, de l'absence de systèmes de protection et du risque accru de violence sexuelle.

Le Kenya s'est engagé à éliminer les mariages d'enfants, les mariages précoces et les mariages forcés d'ici 2030, conformément à la cible 5.3 des Objectifs de développement durable. Le gouvernement n'a pas fourni de mise à jour sur les progrès accomplis dans la réalisation de cette cible lors de son examen national volontaire au Forum politique de haut niveau de 2017. Le gouvernement a présenté un examen national volontaire lors du forum politique de haut niveau de 2020. Dans cet examen, le gouvernement a reconnu que les pratiques néfastes, les mariages d'enfants, les grossesses d'adolescentes et la mauvaise gestion de l'hygiène menstruelle affectent la fréquentation et l'achèvement de la scolarité des filles. Entre 2016 et 2019, 1 996 cas de mariages d'enfants, 2 105 cas de grossesses d'adolescentes, 5 877 cas d'abus/violences physiques et 6 472 cas de défloration ont été enregistrés au Kenya. La majorité des cas de mariage d'enfants signalés au cours de cette période concernaient des enfants âgés de 10 à 14 ans(54 % de filles et 3 % de garçons) et de 16 à 18 ans(41 % de filles et 2 % de garçons). Le gouvernement n'a pas présenté d'examen national volontaire dans le cadre d'un forum politique de haut niveau depuis 2020. Le gouvernement doit présenter un examen national volontaire en 2024.

Le Kenya a coparrainé les résolutions 2013, 2014, 2016, 2018, 2020 et 2022 de l'Assemblée générale des Nations unies sur le mariage des enfants, le mariage précoce et le mariage forcé, ainsi que la résolution 2013 du Conseil des droits de l'homme sur le mariage des enfants, le mariage précoce et le mariage forcé. En 2014, le Kenya a signé une déclaration commune au Conseil des droits de l'homme appelant à une résolution sur le mariage des enfants.

Le Kenya a ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant en 1990, que le Comité des droits de l'enfant a interprétée de manière à recommander l'établissement d'un âge minimum du mariage de 18 ans, et a adhéré à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDAW) en 1984, qui oblige les États à garantir le libre et plein consentement au mariage.

En 2017, le Comité CEDAW a fait part de ses préoccupations concernant la pratique du prix de la fiancée et du mariage d'enfants au Kenya.

Lors de l'examen périodique universel de 2015[KC2], le Kenya a soutenu quatre recommandations visant à renforcer les efforts pour éliminer le mariage des enfants.

En 2000, le Kenya a ratifié la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant, y compris l'article 21 concernant l'interdiction du mariage des enfants.

En 2010, le Kenya a ratifié la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples sur les droits des femmes en Afrique, y compris l'article 6 qui fixe l'âge minimum du mariage à 18 ans.

En 2017, le Kenya est devenu le 19e pays à lancer la campagne de l'Union africaine pour mettre fin au mariage des enfants en Afrique.

Le Kenya est l'un des 20 pays qui se sont engagés à mettre fin au mariage des enfants d'ici à la fin de l'année 2020 dans le cadre de l'engagement ministériel sur l'éducation sexuelle complète et les services de santé sexuelle et reproductive pour les adolescents et les jeunes en Afrique de l'Est et en Afrique australe.

Lors du London Girl Summit en juillet 2014, le gouvernement a signé une charte dans laquelle il s'engage à mettre fin au mariage des enfants d'ici 2020.

Le Kenya est l'un des pays où le plan d'urgence du président des États-Unis pour la lutte contre le sida (PEPFAR)/l'initiative DREAMS s 'efforce de réduire les taux de VIH chez les adolescentes et les jeunes femmes.

Le Kenya est un pays partenaire du Partenariat mondial pour l'éducation (PME).

Le Plan d'action national pour lutter contre l'exploitation et les abus sexuels des enfants en ligne (2022-2026) est le premier du genre au Kenya. Ce plan d'action national vise à éliminer l'exploitation et les abus sexuels des enfants en ligne au Kenya ; dans le cadre de ce plan, le mariage des enfants, le mariage précoce et le mariage forcé sont considérés comme une forme d'exploitation.

Le plan d'action national pour les enfants au Kenya (2015-2022)[KC1] [RH2] reconnaît que le mariage des enfants entraîne des abus physiques, sexuels et émotionnels sur les enfants et qu'il est important de sensibiliser le public en ciblant les barazas (réunions communautaires), les familles et les enfants.

Le plan national de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants au Kenya (2018-2022) reconnaît que le mariage des enfants est une pratique néfaste qui contribue aux abus et à l'exploitation sexuels des enfants, et il prévoit des activités visant à engager les hommes en tant que champions de la communauté dans la réduction des mariages d'enfants.

En octobre 2016, le département du genre et le conseil anti-MGF au sein du ministère de la fonction publique, de la jeunesse et du genre ont dirigé l'élaboration d'un projet de plan d'action national sur le mariage des enfants. Ce processus a impliqué les membres de Girls Not Brides, et les consultations menées par UNICEF Kenya se poursuivent. Cependant, en 2024, ce plan national n'est pas encore finalisé.

L'UNICEF Kenya et le haut-commissariat australien ont organisé une réunion des parties prenantes sur le mariage des enfants en novembre 2017, au cours de laquelle la campagne #ENDChildMarriageKE a été lancée.

Le Kenya était l'un des pays cibles de la phase II du programme conjoint UNFPA-UNICEF sur les MGF/E (2018-2021).

Les bureaux de probation de district sont actifs dans plusieurs régions du Kenya et sont chargés de réhabiliter les victimes de mariages d'enfants, d'enquêter sur les cas de mariage d'enfants, de faire des recommandations aux autorités compétentes et de sensibiliser les communautés aux conséquences du mariage d'enfants.

En vertu de la loi de 2014 sur le mariage, l'âge minimum légal pour se marier est de 18 ans, sans aucune exception.

En outre, la loi de 2010 sur la lutte contre la traite des personnes classe le travail des enfants, le mariage des enfants et l'exploitation sexuelle parmi les formes d'exploitation.