Maroc

Au Maroc, 14 % des filles sont mariées avant leur 18e anniversaire et 1 % avant l'âge de 15 ans.

Début 2020, le ministre marocain de la Justice a annoncé que 32 000 demandes de mariage avec des enfants avaient été déposées en 2019, dont 81 % ont été approuvées.

ONU Femmes a identifié des points chauds pour le mariage des enfants à Azrou, Midelt, Beni Mellal, Marrakech, Azilal et Casablanca.

Selon l'UNICEF, le risque de mariage des filles avant l'âge de 18 ans au Maroc est inférieur à la moitié de ce qu'il était il y a trente ans. Cependant, les informations statistiques peuvent être en contradiction avec cette affirmation, car de nombreux mariages d'enfants ne sont pas officiellement enregistrés.

Le mariage d'enfants est motivé par l'inégalité entre les sexes et la croyance que les filles sont en quelque sorte inférieures aux garçons.

Au Maroc, le mariage des enfants est exacerbé par :

● Le niveau d'éducation : Une étude réalisée en 2019 a révélé que les trois quarts des parents d'enfants mariés avant l'âge de 18 ans étaient analphabètes ou n'avaient pas terminé l'école primaire. Un quart des filles marocaines sans instruction étaient mariées avant l'âge de 18 ans, contre 7 % des filles ayant suivi un enseignement secondaire ou supérieur.

● La pauvreté: Le mariage d'enfants offre une certaine sécurité financière et réduit le fardeau perçu des filles pour leur famille. Certains juges des affaires familiales autoriseraient les mariages d'enfants pour des raisons économiques dans les régions les plus pauvres.

● L'inégalité entre les sexes: Les femmes et les filles sont souvent censées se conformer à des rôles stricts et sexospécifiques d'épouses et de mères et n'ont que peu de pouvoir de décision. Des rapports ont souligné que le Printemps arabe a renforcé les croyances conservatrices sur les rôles de genre.

● Les relations sexuelles avant le mariage : Certaines familles marient leurs filles si elles les soupçonnent d'avoir une relation sexuelle hors mariage, ce qui est toujours considéré comme un crime en vertu de l'article 490 du code pénal marocain.

● Pratiques néfastes : Le mariage d'enfants prévaut sous la forme de mariages temporaires, de mariages consanguins et de polygamie, qui sont utilisés comme moyen de contourner les restrictions islamiques sur les relations sexuelles hors mariage. En outre, la plupart des mariages d'enfants, en particulier dans les zones rurales, sont célébrés en vertu du droit musulman coutumier(Al Fatiha). En fin de compte, les juges sont contraints de reconnaître le mariage rétrospectivement.

● La violence à l'encontre des filles: En 2012, Amina Filali, 16 ans, s'est suicidée après avoir été contrainte d'épouser l'homme qui l'avait violée. L'article 475 controversé du code pénal marocain est utilisé pour permettre aux violeurs d'échapper aux poursuites en épousant leurs victimes, même si elles n'avaient pas atteint l'âge légal du mariage, fixé à 18 ans. Une étude réalisée en 2011 par le Haut Commissariat au Plan du Maroc montre que les jeunes femmes qui se marient sans consentement sont presque trois fois plus susceptibles de subir des violences de la part de leur partenaire intime.

● L 'honneur de la famille : Une étude de 2013 montre que les parents, et dans certains cas les tantes et les oncles, jouent un rôle important dans la décision de marier les filles, souvent pour des raisons associées à la préservation de l'honneur et à la crainte que leurs filles ne soient rejetées si elles ne sont pas mariées à un certain âge.

● La religion : Dans une étude de 2017, les participants ont souligné qu'une mauvaise interprétation des principes religieux permet le mariage des enfants au Maroc. Certaines personnes pensent que l'islam tolère le mariage des filles dès qu'elles ont leurs premières règles.

● Pression sociale: certaines familles se sentiraient poussées à marier leurs filles à un jeune âge afin d'éviter les sanctions sociales de la communauté, notamment les ragots, la honte et la stigmatisation.

● COVID-19 : La pandémie de COVID-19 a eu un impact significatif sur certains des ménages les plus pauvres et a exacerbé la vulnérabilité des enfants. La pandémie a exposé les familles vulnérables à la perte de revenus financiers, les poussant encore plus loin dans la pauvreté et l'exclusion. Les fermetures d'écoles ont aggravé la vulnérabilité des jeunes filles, les rendant plus vulnérables aux abus et aux mariages d'enfants.

Le Maroc s'est engagé à mettre fin aux mariages d'enfants, aux mariages précoces et aux mariages forcés d'ici 2030, conformément à la cible 5 .3 des Objectifs de développement durable.

Le gouvernement n'a pas présenté d'examen national volontaire dans le cadre d'un forum politique de haut niveau à ce jour.

Le Maroc a coparrainé la résolution procédurale de 2013 sur le mariage des enfants, le mariage précoce et le mariage forcé, la résolution de 2021 sur le mariage des enfants, le mariage précoce et le mariage forcé en temps de crise, y compris la pandémie de COVID-19, et la résolution de 2023 sur l'élimination et la prévention du mariage forcé. En 2014, le Maroc a également signé une déclaration conjointe au Conseil des droits de l'homme appelant à une résolution sur le mariage des enfants.

Le Maroc a coparrainé les résolutions 2013, 2014, 2016, 2018, 2020 et 2022 de l'Assemblée générale des Nations unies sur le mariage des enfants, le mariage précoce et le mariage forcé.

Le Maroc a ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant en 1993, que le Comité des droits de l'enfant a interprétée comme recommandant l'établissement d'un âge minimum du mariage de 18 ans, et a adhéré à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDAW) en 1993, qui oblige les États à garantir le libre et plein consentement au mariage. Toutefois, le Maroc a émis une réserve à l'égard de l'article 2 de la CEDAW, relatif au droit à la non-discrimination, selon laquelle il est disposé à appliquer les dispositions de cet article, à condition qu'elles n'entrent pas en conflit avec les dispositions de la charia islamique.

Lors de son examen en 2022, le Comité CEDAW s'est dit préoccupé par le fait qu'il n'existe pas d'âge minimum légal pour le mariage et que les mariages d'enfants ont lieu sous la forme de mariages Al-Fatiha . Le Comité a recommandé au gouvernement de mettre en place des mesures pour interdire les mariages Al-Fatiha impliquant un mineur et de porter l'âge minimum légal à 18 ans, sans aucune exception.

Lors de son examen en 2014, le Comité des droits de l'enfant des Nations unies a regretté qu'aucune mesure spécifique n'ait été prise pour soustraire les filles aux mariages forcés et que des milliers de filles âgées d'à peine 13 ans soient mariées chaque année en raison des nombreuses dérogations à la loi accordées par les juges aux affaires familiales.

Lors de son examen périodique universel de 2017, le Maroc a accepté d'examiner les recommandations visant à réviser le code de la famille afin d'interdire le mariage des enfants.

Le Maroc n'a ni signé ni ratifié la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples sur les droits de la femme en Afrique, y compris l'article 6 qui fixe l'âge minimum du mariage à 18 ans, ni la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant, y compris l'article 21 concernant l'interdiction du mariage des enfants.

En avril 2021, le Lions Club International - District 416 Maroc a organisé un colloque sur le thème du mariage des enfants. L'objectif principal de ce colloque était de sensibiliser et d'éduquer le public à la prévention des mariages précoces ou forcés.

Début 2020, tout en annonçant le nombre de demandes de mariage d'enfants en 2019, le ministère marocain de la Justice a déclaré que, compte tenu de la prévalence du mariage d'enfants, celui-ci ne pouvait "plus être considéré comme une exception" et qu'il nécessiterait " une intervention horizontale de tous les secteurs (de l'État)".

En 2019, l'UNICEF a lancé le projet "Lutte contre les violences sexuelles faites aux filles et contre les mariages précoces" qui vise à promouvoir des normes sociales positives et un cadre juridique protecteur pour les filles contre les mariages d'enfants et les violences sexuelles. Cependant, la pandémie de COVID-19 a eu un impact sur la mise en œuvre complète de ce projet.

En 2015, le Maroc a adopté la Politique publique intégrée de protection de l'enfance (PPIPEM) avec l'appui technique de l'UNICEF. Cette politique prévoit la mise en place d'un système intégré de protection de l'enfance qui prend en compte le développement institutionnel, social, économique et culturel du pays et qui assure un environnement protecteur efficace conformément aux normes nationales et internationales.

La même année, le Premier ministre Abdelilah Benkirane a suscité la controverse en déclarant qu'il n'y avait pas de mariages de mineurs au Maroc et que si des mariages d'enfants se produisaient, c'était en raison du choix des filles.

Le programme La Rabita Mohammedia des Oulémas a impliqué les chefs religieux et les communautés dans la lutte contre la violence fondée sur le sexe, y compris le mariage des enfants. Le programme a produit des supports audiovisuels pour sensibiliser les enfants à l'impact du mariage des enfants et comprend un mécanisme de formation pour permettre aux jeunes hommes d'enseigner les droits de l'homme aux enfants.

En 2004, le gouvernement marocain a introduit un nouveau code de la famille(Moudawana).

Cette loi visait à renforcer les droits des femmes et à relever l'âge minimum du mariage de 15 à 18 ans. Cependant, les pouvoirs discrétionnaires de la loi signifient que les filles peuvent se marier avant 18 ans avec le consentement de la justice.

La majorité des mariages d'enfants ont lieu dans les zones rurales et sont célébrés en vertu de la loi coutumière musulmane Al Fatiha, et les juges sont contraints de reconnaître le mariage rétrospectivement.

En 2018, une nouvelle loi sur la lutte contre la violence à l'égard des femmes a été introduite, ce qui a marqué une avancée positive en termes de définition et de criminalisation des actes considérés comme du harcèlement, des agressions, de l'exploitation sexuelle et du mariage forcé des filles et des femmes.

Cependant, la loi elle-même n'aborde pas la question du mariage des enfants ni celle de la violence exercée par les partenaires intimes, dont sont victimes de nombreuses jeunes filles mariées.