En Afrique de l’Ouest et du Centre, 39 % des filles sont mariées avant l’âge de 18 ans. La région abrite sept des dix pays où la prévalence du mariage des enfants est la plus élevée au monde. Le Niger enregistre le taux le plus élevé avec 76% de filles mariées avant l’âge de 18 ans et 28% de filles mariées avant 15 ans. La Côte d'Ivoire compte plus de 2 millions d'enfants mariés, et une jeune femme sur quatre a été mariée pendant son enfance. Les taux de mariages d’enfants varient considérablement selon le contexte. En Afrique de l’Ouest et du Centre, le mariage des enfants est plus de deux fois plus répandu dans les zones rurales que dans les zones urbaines, et plus de trois fois plus répandu dans le quintile le plus pauvre de la population que dans le quintile le plus riche.
Cette réalité, alarmante, reflète une crise profonde des droits des enfants et de l’égalité de genre. Le mariage des enfants prive les filles de leur droit à l’éducation, compromet leur santé, restreint leur participation sociale et économique, et les expose à de multiples formes de violence. Mettre fin au mariage des enfants n’est pas seulement une exigence en matière de droits humains, c’est aussi un impératif de justice, d’équité et de développement durable.
Face à cette urgence, nous réaffirmons notre conviction collective que l’éducation est un levier puissant de transformation sociale. Les données sont claires : les filles qui restent scolarisées sont moins susceptibles de se marier tôt, ont de meilleures perspectives économiques, et participent activement à la vie de leur communauté. L’éducation protège, émancipe et transforme.
L'éducation protège, responsabilise et transforme.
Mais pour qu’elle joue pleinement ce rôle, l’éducation doit être inclusive, équitable et transformatrice de genre. Cela suppose de s’attaquer aux racines structurelles de l’exclusion – patriarcat, pauvreté, discrimination – et de concevoir des environnements d’apprentissage sûrs, bienveillants et porteurs de droits, qui valorisent l’autonomie, la dignité et le leadership des filles.
C’est dans cet esprit que nous, représentant·e·s des coalitions nationales pour l’éducation et la fin des mariages d’enfants (CNME/FME) , jeunes militant·e·s, organisations de la société civile du Benin, Burkina Faso, Cote d’Ivoire, Mali, Niger, Sénégal et Togo, Institutions régionales, continentales et partenaires mondiaux – dont Girls Not Brides, ANCEFA, Girls First Fund, FAWE, Union Africaine AU CIEFFA, UNGEI, Bantare Impact Group, Global Campaign For Education et d’autres – réunis à Grand Bassam, Côte d’Ivoire, affirmons notre engagement commun pour une région où chaque fille est protégée contre les mariages et unions d’enfants, précoces et forcés (CEFMU).
Nous réaffirmons que l'accès à une éducation gratuite, de qualité et sûre est un droit fondamental pour chaque enfant et appelons tous les gouvernements à mettre en œuvre des systèmes éducatifs transformateurs en faveur de l'égalité de genre.
Nous reconnaissons l’urgence de faire face aux crises humanitaires interconnectées – pauvreté, conflits, changement climatique, qui entrainent le recul des droits des filles – et réaffirmons notre détermination à une mobilisation collective ne laissant aucune fille pour compte.
Notre vision collective
Nous aspirons à un avenir où chaque fille est instruite, autonome et libre de faire des choix éclairés sur sa vie et son avenir.
Nous croyons qu’une éducation transformatrice de genre et l’élimination des mariages d’enfants sont essentielles pour réaliser l’épanouissement des enfants, la justice sociale, l’égalité des sexes et le développement durable en Afrique de l’Ouest.
Nos engagements communs
1. Faire progresser l'éducation à la transformatrice de genre
- Encourager les reformes législatives et soutenir les politiques, programmes et environnements scolaires qui remettent en cause les normes de genre néfastes, promeuvent l’égalité et renforcent l’autonomisation des filles.
2. Mettre fin au mariage des enfants d'ici à 2030
- Œuvrer pour l’alignement de toutes les législations nationales sur l’âge minimum légal du mariage à 18 ans, sans exception, et mettre en œuvre les stratégies et des plans d'action nationaux pour y parvenir.
- Plaider au niveau national et régional pour la mise en œuvre des engagements pris au niveau global, continental, régional et/ou national, le respect et l'appropriation des lois au niveau communautaire.
3. Augmenter et suivre le financement de l'éducation
- Plaider pour que les etats respectent leurs engagements de consacrer au moins 20 % des budgets nationaux aux dépenses d'éducation, avec des financements spécifiques alloués pour l’éducation des filles et des communautés marginalisées.
4. Renforcer l'engagement et le leadership des jeunes
- Créer des opportunités d’apprentissage et de participation des jeunes filles et garçons au dialogue politique, notamment des jeunes issus de communautés rurales.
- Renforcer le plaidoyer en faveur de l'institutionnalisation de la participation significative des jeunes la conception, la mise en œuvre et au suivi des politiques éducatives, surtout dans leurs communautés respectives.
5. Assurer l'apprentissage en situation de crise
- Reconnaître que les filles sont particulièrement vulnérables en période de crise et qu’un support adéquat spécifique doit leur être accordé.
- Développer et mettre en œuvre des réponses éducatives sensibles au genre, notamment dans les contextes humanitaires et de conflits
6. Renforcer les données et la redevabilité
- Renforcer et financer la collecte et la dissémination de données sensibles au genre sur les inégalités et les interactions entre le genre et l’environnement.
- Utiliser des données désagrégées par sexe et soutenir le suivi conduit par la société civile, pour mesurer les progrès réalisés,
- S’appuyer sur le premier Rapport Continental de l’Union africaine et de l’UNESCO sur l’état de l’éducation des filles et des femmes afin de s’informer des progrès réalisés et des défis persistants dans les pays de l’Afrique de l’Ouest.
7. Favoriser la collaboration multisectorielle
- Renforcer la coordination entre les secteurs de l'éducation, de la protection de l'enfance, de la santé et de la justice dans les réponses nationales et régionales pour mettre fin au mariage des enfants et à promouvoir l'éducation des filles.
8. Rehausser la masculinité positive pour la lutte contre les mariages et unions d’enfants, précoces et forcés et la promotion de l’éducation des filles
La voie à suivre
Nous nous engageons à mettre en œuvre collectivement cette déclaration et à en assurer le suivi par la finalisation et la mise en œuvre de la stratégie régionale à travers :
- la collaboration régionales,
- les plans d'action nationaux, et
- l'apprentissage partagé.
Appelons à une rencontre en 2026 pour évaluer les progrès réalisés, ajuster les priorités, et réaffirmer notre engagement commun.
Signataires
- Filles Pas Epouses
- ANCEFA
- GROUPE BANTARE IMPACT
- AU CIEFFA
- FONDS GIRLS FIRST
- FAWE
- Campagne mondiale pour l'éducation
- Coalitions Education Pour Tous (EPT) :
- Bénin,
- Burkina Faso,
- Côte d'Ivoire,
- Mali,
- Niger,
- Sénégal,
- Togo
- Coalition Fin Marriage Enfants (FME)
- Bénin,
- Burkina Faso,
- Côte d'Ivoire,
- Mali,
- Niger,
- Sénégal,
- Togo.