À l'occasion de la Journée mondiale des réfugiés, le Réseau de recherche et d'action sur le mariage des enfants (CRANK) a organisé sa deuxième réunion de recherche de l'année 2023 afin de présenter certaines des données les plus récentes sur la lutte contre le mariage des enfants dans les situations de conflit et de crise. Une attention particulière a été accordée à l'aide aux filles mariées à vie qui sont déplacées ou réfugiées, et qui sont largement négligées par les programmes et politiques actuels.
Le plus récent rapport de l’UNICEF sur le mariage des enfants confirme les conséquences des conflits et des crises : pour chaque décuplement du nombre de décès liés aux conflits, les taux de mariages d’enfants augmentent de 10 % ; pour chaque changement de 10 % dans les précipitations en raison des changements climatiques, les taux de mariages d’enfants augmentent de 1 %. Dans ces contextes, le mariage menace également la santé physique et mentale des filles et limite leur pouvoir décisionnel, leur éducation et leur accès à des services de santé sexuelle et reproductive et autres services de soutien.
Malgré cela, il existe très peu d’interventions de qualité dans les situations de conflit ou de crise et peu de données sur les moyens de mettre en œuvre et d’évaluer les interventions auprès des personnes réfugiées dans les pays à revenu faible ou intermédiaire.
Points à retenir
- Pour assurer la réussite et la viabilité d’un programme, il est essentiel de l’adapter au contexte. C’est donc dire qu’il faut tirer des enseignements des données et des programmes existants et les adapter aux situations de crise et de conflit. Notamment, il convient de tenir compte des facteurs et des conséquences du mariage des enfants avant, pendant et après les déplacements et de s’y adapter.
- Pour que les interventions soient bien accueillies et efficaces à long terme, il est essentiel de mobiliser les communautés. Cela signifie bâtir de véritables partenariats, dirigés par les membres de la communauté qui connaissent le mieux le contexte, tout en reconnaissant que ce contexte est également source de contraintes pour ces personnes (p. ex., la pauvreté, l’insécurité et les normes de genre). Lorsqu’il est question de mobiliser les garçons, le travail sur les compétences de communication et de négociation constitue un excellent point de départ ; pour ce qui est des hommes, il est également efficace de se concentrer sur les conséquences négatives d’un mariage avec une fille de moins de 18 ans.
- Il convient d’accorder une plus grande attention à l’expérience du déplacement et de fournir un soutien continu dans les contextes de crises prolongées et complexes, ainsi qu’après le mariage. Les filles mariées et déplacées doivent être rendues visibles en tant que groupe marginalisé qui souffre souvent de détresse émotionnelle. Les interventions doivent établir un plan et un budget pour assurer et maintenir l’accès de ces filles à des services et à un soutien, notamment par l’entremise de réseaux de pairs et un accès à des adultes qui les soutiendront. Les services de soutien liés à la santé mentale, au divorce et à la violence basée sur le genre (VBG) sont également essentiels.
- Les interventions doivent être multisectorielles et multidimensionnelles. Les approches fondées sur l’autonomisation sont importantes, mais difficiles à mettre en œuvre dans les situations de crise et de conflit. Pour remédier aux obstacles structurels qui entravent les droits, la capacité d’action et le leadership des filles, les interventions doivent cibler divers domaines : la santé et les droits sexuels et reproductifs (SDSR), la santé mentale, l’éducation, les moyens de subsistance (non traditionnels) et l’émancipation économique, la protection de l’enfance, la protection contre la VBG et les lois et politiques.
Cette réunion de recherche du CRANK était un espace pour :
- Discuter des données avérées et des enseignements tirés de :
- Examiner les implications de ces données pour la recherche, les programmes et les politiques.
- Écouter des chercheur·se·s et professionnel·le·s faire un bref exposé des plus récentes recherches sur le mariage des enfants.
Les modérateurs et les orateurs étaient les suivants :
- Maha Muna, conseillère régionale sur le genre pour l’UNICEF Moyen-Orient et Afrique du Nord et directrice du collectif interinstitutionnel Gender in Humanitarian Action.
- Dr. Maia Sieverding, professeure adjointe en sciences de la santé et et Dr. Sawsan Abdulrahim, professeur de sciences de la santé, Université américaine de Beyrouth.
- Dr. Nicola Jones, chercheuse principale du programme Gender and Adolescence: Global Evidence de l’ODI.
- Dr. Rochelle Burgess, professeure adjointe en santé mondiale de l’University College de Londres, et Dr. Nyaradzayi Gumbondzvanbda, fondatrice et directrice générale du Rozaria Memorial Trust.
- Dr. Aisha Hutchinson, professeur de sciences sociales au King’s College de Londres.